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Quel bonheur de pouvoir rencontrer les artistes qu’on aime et de leur poser des questions ! Bien évidemment, le groupe KID KAPICHI s’est prêté au jeu et sincèrement, ils sont ultra cool. Enfin surtout Ben le guitariste puisque c’est lui que nous avons eu la chance de rencontrer. Cette interview va se concentrer sur leur actualité, puisqu’ils sont en concert le 21 Février 2023 au point Ephémère et qu’ils viennent de sortir leur second opus « Here’s What You Could Have Won ». Ils rencontrent un succès fulgurant en France et autant leur demander comment ils le vivent.

On espère que vous allez apprécier cette interview qui a été donnée en Septembre dernier et qui a été diffusé à ce moment là à l’antenne, voici donc la retranscription., bonne lecture.

RSTLSS : Bonjour comment vas-tu ?

Ben : Bonjour, très bien merci !

RSTLSS : Tu es content d’être à Paris ? Qu’est-ce que ça signifie d’être là pour toi ?

Ben : C’est très excitant d’être là ! La dernière fois qu’on était à Paris c’était quand on a fait la première partie du concert de Frank Carter and the Rattlesnakes et c’était l’un des meilleurs concerts qu’on ait fait ! C’était en 2019, tout le monde était super excité et maintenant on a hâte d’être de retour en tête d’affiche. C’est fou ! C’était notre première fois en France tout le monde était super content, puis avec le covid tout a été décalé. C’est vraiment le truc qu’on attend de rejouer en France !

RSTLSS : C’est la seule fois où vous avez joué en France ?

Ben : Nous devions revenir avec Nothing but Thieves, mais ce même soir Liam Gallagher nous a demandé d’ouvrir pour lui au Albert Hall. On a donc fait toute la tournée de Nothing but Thieves sauf la date à Paris. Tout le monde nous a dit que c’était un super concert et on était un peu déçu, mais en même temps on n’aurait loupé ça que pour une opportunité comme jouer pour Liam Gallagher !

RSTLSS : Y’a-t-il d’autres concerts prévus à Paris dans le futur ?

Ben : En février ! On fait l’Angleterre, l’Europe puis les États-Unis !

RSTLSS : Vous allez également faire un festival en France cette fin d’année, les Trans musicales de Rennes, non ?

Ben : Oui c’est super excitant. On a d’autres amis qui y ont déjà joué, ils ont dit qu’on allait passer une super soirée. C’est super cool de commencer à avoir de la visibilité en France. Kid Kapichi est là ! On va pouvoir jouer toutes ces nouvelles chansons, c’est super excitant !

RSTLSS : Tu sais que les Trans musicales c’est une grosse fête ? Ça va être énorme !

Ben : On me l’a dit (rire), j’ai vraiment hâte ! En plus on joue assez tard donc la fête aura déjà commencée !

RSTLSS : Qu’est qui rend votre musique si “british” ? L’accent ? Cette énergie punk ?

Ben : Je pense que c’est un mix de tout ça. L’énergie, l’aspect critique de la vie sociale… Il y a aussi un son très british sur le riff. Il y a certain son spécifique au punk, grunge, hiphop très spécifique à cette sphère musicale anglaise. On est influencé par ça dans l’instrumental et les top lines je pense !

RSTLSS : On a un peu fait un parallèle avec l’Allemagne quand il y avait la séparation est/ouest avec la situation en Angleterre aujourd’hui. Est-ce que tu as l’impression que le punk aide la population anglaise comme la techno a pu le faire en Allemagne ?

Ben : Oui, je pense que le punk le fait. Mais il y a une colère dans tous les genres musicaux en ce moment. À l’époque c’était vraiment dans le punk, dans cette musique, mais maintenant on retrouve l’attitude punk dans beaucoup de musiques différentes. C’est quelque chose d’intéressant à voir. Depuis que nous sommes un groupe et qu’on a commencé à en parler, on s’est rendu compte que c’est beaucoup plus présent parmi les fans de musique “mainstream”. Je pense que ça met en lumière la situation sociale à travers l’Europe et le monde.

RSTLSS : Dans vos paroles et dans votre musique, il y a cette urgence à propos de la situation de votre pays, que voulez-vous mettre en avant en faisant ça ?

Ben : Je pense que le but de notre musique est de rendre responsable de leurs actions le système de pouvoir du pays. Je pense que c’est important. L’art est un très bon moyen pour ouvrir les conversations qui permettent de faire bouger les choses mais aussi que les gens prennent conscience de leur part dans une situation. C’est quelque chose d’important. Quand on a commencé à faire de la musique, on ne s’est pas dit “on devrait être ce genre de groupe”. On avait déjà ce genre de conversation lorsque qu’on écrivait notre musique, lorsque qu’on était plus jeune. On se disait “on devrait parler de ça” et je pense que c’est la chose la plus importante à faire. Je pense d’ailleurs que les gens le font de plus en plus dans la musique et l’art en général.

RSTLSS : Est-ce que tu penses qu’il est nécessaire que les artistes utilisent leur plateforme pour parler de ces injustices, que ce soit dans leur pays ou dans le monde ?

Ben : Si c’est authentique. Je ne pense pas que les gens doivent le faire, mais si tu peux utiliser ta plateforme en tant qu’artiste pour mettre en lumière ces injustices, c’est une bonne manière d’utiliser sa plateforme. Il y a tellement de formes d’art différentes que tout le monde n’est pas obligé de le faire. Les gens sont frustrés, ils veulent que le système de pouvoir prenne conscience de ses responsabilités.

RSTLSS : Une œuvre musicale est également une preuve de ce qu’il s’est passé à cet instant, ça permet de créer une preuve pour les générations futures. Cet album est-t ’il une marque de ça ?

Ben : Oui, je pense qu’on écoute des chansons aujourd’hui sur la guerre du Vietnam ou d’autres gros évènements politiques du passé. Et quand on écoute nos chansons on sent l’humeur du moment oui. La musique met en lumière ce qu’il se passe actuellement et on espère que dans 20 ans les choses aillent mieux.

RSTLSS : La chanson New England est à propos de ça ? Qu’est-ce qui a fait que vous avez voulu écrire cette chanson ?

Ben : Elle devait sortir au début du confinement, avec cette transition dans le monde du Brexit. On n’arrêtait pas de voir des gens super heureux de la situation, mais on commençait déjà à voir tous les effets négatifs du Brexit. Je parle de choses pratiques comme l’import et l’export de marchandises, mais l’humeur des gens en général a aussi commencé à se séparer. C’était la première chanson qu’on a écrit qui ne parlait pas du gouvernement comme une entité de pouvoir, mais plus des gens et de leur attitude. Dès qu’on a commencé à écrire la chanson on s’est dit qu’on voulait parler de notre colère envers l’attitude des gens à propos de ce qu’il se passe avec le Brexit. Je pense que le message de la chanson a vraiment été complété par le couplet de Bob Vylan. Ce qu’on avait écrit expliquait les choses dans une certaine limite et quand il est revenu avec ses paroles, il l’a vraiment abouti. On ne savait pas qu’il serait sur la chanson au début. C’est en écrivant qu’on a eu l’idée et on espérait vraiment qu’il dirait oui.

RSTLSS : C’est aussi une façon de mettre le problème du racisme dans le pays en avant ?

Ben : Oui, le racisme et la xénophobie ne cesse de monter à travers l’Europe. Avec les élections en Italie par exemple, on voit que l’idéologie de l’extrême droite monte vraiment. Ça fait peur.

RSTLSS : Est-ce que tu penses que votre musique est une forme d’échappatoire pour le peuple, qui hormis le foot et le pub ne semble plus avoir grand-chose d’autre pour se distraire ?

Ben : Je ne sais pas… Je pense que les gens qui cherchent une échappatoire de la tension quotidienne est une partie importante de la vie et quand la situation devient compliquée, ils trouvent cette échappatoire dans ces choses, que ce soit faire la fête, de l’art, ou le sport. Ces choses ont un but dans l’unification du peuple. Je ne pense pas que c’est la seule chose que les gens ont, mais que ces choses ont une place importante dans la société.

RSTLSS : Serait-ce la raison pour laquelle l’album s’appelle “Here’s What You Could Have Won” et que la pochette représente un trophée ?

Ben : La pochette représente ce qu’on aurait pu gagner si tout c’était passé comme prévu et qu’il n’y avait pas eu toutes ces tensions. On aurait pu avoir quelque chose de diffèrent mais nous voilà, les gens ont choisi quelque chose de différent.

RSTLSS : Est-ce que c’est comme en France, les gens sont dépités ?

Ben : Oui je pense. Quand les choses vont mal, je pense qu’il est facile de ne plus se reconnaitre dans le système mis en place dans le pays, que peu importe ce que tu fais, ça ne se passera jamais comme tu le veux. Mais je pense qu’il est extrêmement important que les gens restent engagés avec ce qu’il se passe. Même si on aimerait que ça se passe différemment, les choses sont comme elles sont et on doit être actifs dans ça si on veut voir du changement. Mais il est facile de comprendre pourquoi les gens se sentent comme ça. En France j’ai l’impression que les gens sont beaucoup plus prêts à manifester qu’en Angleterre. Il est difficile de faire sortir les gens pour protester en Angleterre.

RSTLSS : Dans la chanson “Rob the Supermarket”, est-ce que le message est que la seule solution face à la pauvreté grandissante est de voler dans les supermarchés ? Que c’est la seule solution donnée par le gouvernement ?

Ben : Oui, avec le niveau de vie qui augmente, si vous allez faire quelque chose comme ça, voler dans une grande enseigne, c’est évidemment une métaphore, si vous en avez vraiment besoin, ce ne seront pas les victimes d’un crime. Ce n’est pas mal de prendre dans les poches d’une grosse entreprise, si vous êtes dans une situation désespérée. On en parlait l’autre jour, dans les budgets de supermarché, ils incorporent une partie pour le vol qui est bien plus importante que ce qui est perdu en vol. Donc à chaque fois qu’on achète quelque chose, on paye pour des vols qui ne se font pas. Ils se remplissent juste les poches !

RSTLSS : Dans « I.N.V.U. » vous parlez des réseaux sociaux ?

Ben : Oui, de la culture des influenceurs. C’est toxique, ça créer un faux sens d’importance pour les gens, surtout les jeunes. Dans le groupe on a grandi à une période où les réseaux sociaux sont apparus à la fin de l’adolescence. Je n’arrive pas à imaginer ce que c’est pour les jeunes aujourd’hui de grandir avec quelque chose de toxique et stressant comme ça depuis leur plus jeune âge. C’est fou, c’est beaucoup d’argent. C’est flippant et ça doit être mis en lumière. L’impact de ces paroles sur les réseaux, sur les followers de la personne. C’est à un point où il n’y a plus assez de régulations. Et ce qui est sans régulation a tendance à pencher vers le flippant et le négatif.

RSTLSS : Le groupe apprend aux jeunes cette vérité ?

Ben : On ne dit pas qu’on ne fait pas ce qu’on dit dans nos chansons. Quand tu pointes du doigts quelque chose, il y en a 3 qui te pointent en retour. La raison pour laquelle notre musique est un peu drôle est à cause de ça. On ne veut pas sermonner les gens “vous ne devez pas faire ça, on ne le fait jamais”. On est tous humains, on existe tous dans la société. On veut juste parler et commenter les choses qui font parties intégrantes de nos vies.

RSTLSS : Surtout qu’en tant qu’artiste vous avez besoin des réseaux sociaux pour promouvoir votre travail, non ?

Ben : Oui, exactement. Tu as besoin de prendre part à ce jeu. C’est difficile. Ça ne rend pas moins important le fait de mettre en lumière ces choses, même si on admet qu’on a tous notre part dedans et que c’est mal.

RSTLSS : Là vous êtes à Paris, vous allez faire une tournée aux États-Unis, en Angleterre et en Europe, c’est le rêve devenu réalité. Donc le groupe est surement un bon exemple pour les gens plus jeunes, qu’en travaillant dur on peut y arriver.

Ben : Pour être honnête, je pense que la perception qu’on a est toujours différente de la réalité. Quand tu es plongé dedans tu te rends compte que tu dois toujours continuer à travailler. C’est toujours facile de se dire qu’on a fini alors qu’il y a encore plein de trucs à faire. Ça fait tellement longtemps qu’on travaille, tourner nous donne l’impression que l’effet boule de neige prend de l’ampleur et qu’il faut continuer.

RSTLSS : Surtout avec le covid, et tous ces concerts reportés et annulés. Ça doit être une vraie libération.

Ben : Oui. Mais tu sais quoi, quand le covid a commencé on s’est dit “mince, qu’est-ce qu’on va faire ?”. On a bien utilisé notre temps. On a autoproduit notre premier album, on a compris ce processus, ce qui nous a permis d’écrire le deuxième et le coproduire. C’était quand même étrange. L’idée qu’un jour quelqu’un a appuyé sur un bouton et le monde s’est arrêté du jour au lendemain. On ne savait pas que c’était possible. On a utilisé ce temps de la meilleure façon qu’on pouvait. On se demande si on serait où on en est aujourd’hui si ce n’était pas arrivé, ce sera toujours une question sans réponse mais tout ce qu’on sait c’est qu’on est là aujourd’hui.

RSTLSS : Tu as dit que vous avez produit le premier album et coproduit le deuxième. Vous faites tout par vous même ? Vidéos, etc.

Ben : On travaille avec d’autres gens, des directeurs, on a produit le deuxième album avec Dom Craik de Nothing But Thieves, super producteur, mais on aime pouvoir se débrouiller seul le plus possible. On a été un groupe DIY pendant très longtemps. Tu apprends à tout faire seul, comme ça le jour où tu demandes à quelqu’un de le faire pour toi, tu sais s’ils le font bien ou non. Et comme ça tu sais quand tu trouves quelqu’un de plus doué que toi.

RSTLSS : Et votre image, qui fait un peu gang, vous voulez jouer avec ça ?

Ben : Oui, on vient tout de Hastings, tout le monde fait la fête. On est swaggy dans les vidéos. On se connait depuis qu’on a 12/13 ans. On a une connexion qu’on peut voir dans les vidéos ou quand on joue ensemble. Tu ne peux pas avoir ça avec quelqu’un que tu connais depuis 6 mois. C’est cool d’être dans un gang comme ça, et on a tous le même humour.

RSTLSS : Sur l’album quelle chanson représente le mieux le groupe ?

Ben : Je pense que c’est New England. C’est la première qu’on a sortie. Elle donne le ton de l’album, que ce soit dans la production, l’exploration, le sujet et la vidéo. Si tu me demandes de te montrer une chanson, c’est celle-là.

RSTLSS : Donc pour quelqu’un qui n’a jamais écouté le groupe c’est une chanson accessible ?

Ben : Oui ! Et comme c’est la première, elle t’amène le reste de l’album. Rob the Supermarket est aussi une chanson typique de Kid Kapichi. Notre chanson préfère de l’album est Smash the Gaff, c’est notre préféré à jouer en live. On l’a joué au Reading Festival avant que l’album sorte et la fosse était un grand circle pit, c’était incroyable.

RSTLSS : Dernière question un peu stupide : j’entends des sons à la Arctic Monkeys, est-ce que vous voulez vous battre avec eux ou jouer avec eux ?

Ben : Je pense qu’on veut jouer avec eux. Ils nous ont beaucoup influencé plus jeune. Pas se battre, jouer avec eux !

Et voilà donc l’interview qui se termine, Ben qui nous fait quelques blagues et un concours de grimaces. On a bien ri et sincèrement, c’est un groupe qui vaut largement le détour. Ne vous privez pas de bon son et d’un peu de réflexion.

Merci d’avoir lu cette interview, à très bientôt.